Les timbres-poste monochromes fascinent les collectionneurs par leur beauté sobre et leur valeur historique. Leur production, souvent associée à des moments clés de l'histoire, en fait des objets de collection recherchés. Leur retour dans le monde philatélique moderne timbres témoigne de leur pérennité et de leur capacité à traverser les époques.
Un timbre-poste monochrome est un timbre dont l'illustration a été réalisée en utilisant une seule couleur ou plusieurs nuances d'une même couleur.
Contrairement aux timbres-poste multicolores, qui emploient une palette variée pour représenter des images ou des scènes, le timbre monochrome repose sur la simplicité de la seule teinte pour créer un effet visuel épuré.
Cette simplicité crée une beauté intemporelle, où chaque ligne, chaque nuance, semble avoir été choisie avec soin pour renforcer l'impact visuel du timbre.
Les timbres-poste monochromes : témoins d'une époque en mutation
Les timbres-poste monochromes sont considérés comme les témoins d’une époque où la technologie d’impression était encore en développement. En effet, la technologie d'impression des timbres-poste a connu des avancées majeures durant le XXe siècle, passant de méthodes artisanales à des procédés industriels de plus en plus sophistiqués.
Au début du XXe siècle, l'impression des timbres-poste était principalement réalisée par la lithographie et la typographie, avec des techniques relativement simples et des couleurs limitées. Avec l'amélioration des technologies d'impression, telles que la gravure sur métal et l'offset, la production des timbres-poste est devenue plus précise et capable de reproduire des détails complexes.
La gravure sur métal, appelée également taille-douce, a été particulièrement populaire à partir des années 1920. Cette technique permit de créer des timbres-poste monochromes contenant une grande finesse de détails. L'offset, devenu dominant dans les années 1930-1940, offrait une solution plus rapide et moins coûteuse pour imprimer des séries de timbres-poste en grande quantité.
L’évolution de la production des timbres-poste monochromes a fait de ces derniers des éléments précieux de l'histoire philatélique ; leur contexte d’émission les rend souvent recherchés par les collectionneurs.
Symboles et récits dans les timbres-poste monochromes : le Mathew de Jean Cabot
Au-delà de leur aspect esthétique et technologique, les timbres-poste monochromes recèlent une importance historique et culturelle. Les collectionneurs apprécient tout particulièrement ceux qui présentent des symboles nationaux ou des portraits de figures historiques.
Les timbres-poste monochromes méritent une attention particulière pour l’histoire qu’ils racontent à travers leur simplicité. Leur design épuré et l’utilisation d’une seule couleur permettent de concentrer l’attention du spectateur sur le message qu’ils véhiculent, créant ainsi une forte impression visuelle et un impact symbolique indéniable.
Le timbre-poste suivant a été émis par le Canada le 1er avril 1949. Il s’intitule Cabot's Matthew Newfoundland Le Mathew de Cabot Terre-Neuve. Il a été créé pour marquer l'entrée de l’île de Terre-Neuve dans la Confédération canadienne, devenant ainsi la 10e province du Canada.
Jean Cabot (Giovanni Caboto) était un navigateur italien qui entra au service de l’Angleterre en 1496. Le roi Henri VII lui avait accordé l'autorisation de partir en expédition à l’ouest pour chercher une route vers l’Asie. En été 1497, Cabot longea les côtes du Labrador et de Terre-Neuve et découvrit de riches bancs de morues dans ces régions.
Terre-Neuve devint officiellement une colonie britannique le 5 août 1583. Cette date marque la première installation officielle de l'Empire britannique en Amérique du Nord, lorsque Sir Humphrey Gilbert, un explorateur anglais, prit possession de l'île au nom de la couronne britannique. Cette action fit de Terre-Neuve la première colonie britannique en Amérique du Nord, bien avant que les autres régions du Canada ne soient colonisées.
Terre-Neuve devint un dominion britannique le 26 septembre 1907, en même temps que la Nouvelle-Zélande. Le terme dominion désignait les colonies britanniques qui avaient obtenu une autonomie gouvernementale significative tout en demeurant sous la couronne britannique. Le premier dominion britannique fut le Canada le 1er juillet 1867, avec la promulgation de la Loi sur l'Amérique du Nord britannique (A.A.N.B.) ; les autres dominion furent l'Australie (1er janvier 1901), et l'Afrique du Sud (31 mai 1910)
Terre-Neuve a toutefois perdu son autonomie en 1934 en raison d’une crise financière majeure. Cette crise fut aggravée par les conséquences de la Grande Dépression mondiale des années 1930. Un gouvernement de régence britannique fut mis en place et entraîna la suspension du gouvernement de Terre-Neuve.
Après la Seconde Guerre mondiale, une convention a été créée afin de réexaminer le statut politique de Terre-Neuve. Les citoyens furent invités à choisir entre trois possibilités : obtenir l’indépendance, adhérer à la confédération canadienne ou demeurer sous la tutelle britannique.
Le 22 juillet 1948, c’est l'adhésion à la confédération canadienne qui l'emporta avec 52,3 % des voix. Le Newfoundland Act fut adopté au Parlement britannique le 23 mars 1949 et la province canadienne de Terre-Neuve vit le jour le 31 mars de la même année.
L’image du timbre-poste présente le navire de Jean Cabot, Le Mattew, avec ses voiles gonflées par le vent. Il arbore au sommet de son plus grand mât le drapeau de l'Angleterre, composé de la croix rouge de saint-Georges sur fond blanc.
Le navire semble avancer sur des vagues dynamiques, évoquant la traversée audacieuse de l'Atlantique à la fin du XVe siècle. À sa gauche, on aperçoit une terre qui est probablement l’île de Terre-Neuve.
La mise en place du navire de Jean Cabot au centre du timbre-poste attire l’attention sur l’événement fondateur que constitue la découverte de Terre-Neuve et, plus largement, de la découverte du Canada. Cette découverte marqua le début d’une longue relation entre Terre-Neuve et le Canada.
Le nom Canada est inscrit en haut du timbre dans une typographie classique et la valeur faciale de 4 cents canadiens apparaît de part et d’autre du Mattew. Les années historiques 1497 et 1949 sont également mises en évidence de chaque côté du navire ; elles soulignent l'écart de plusieurs siècles entre la découverte de la région par Cabot en 1497 et son intégration officielle dans le Canada en 1949.
Bien que la Loi sur les langues officielles du Canada n'ait été adoptée qu'en 1969, l'usage du français et de l'anglais sur le timbre-poste de 1949 reflète une volonté de souligner la coexistence des deux principales communautés linguistiques du Canada : en signalant la présence d'une nation bilingue, on mettait en évidence que l'unité canadienne ne se limitait pas à la langue anglaise et qu'elle incluait également la langue française.
La disposition harmonieuse des éléments sur le timbre-poste illustre très bien la transition de Terre-Neuve d'une colonie britannique à une province canadienne. Le message visuel souligne à la fois l'héritage historique et l'unité nationale du Canada qui agrandit son territoire.
Le timbre-poste du Mathew de Cabot présente plusieurs nuances de vert foncé qui donnent un aspect classique et intemporel à la représentation. Le vert foncé en philatélie a été souvent utilisé pour marquer des événements liés à des changements sociaux ou politiques.
Cette teinte de vert foncé transmet un message optimiste de prospérité et de croissance pour la nation canadienne comportant une nouvelle province.
À l’exemple de ce spécimen philatélique canadien, les timbres-poste monochromes sont prisés pour leurs qualités esthétiques et leur capacité à véhiculer des messages de façon nette et concise.
Un chef-d'œuvre philatélique : l'abbaye de Melk
Les timbres-poste monochromes présentent la plupart du temps des illustrations réalisées par la gravure sur bois ou sur métal. Leur design repose sur l'utilisation habile de nuances et de dégradés de la couleur choisie pour exprimer une idée complexe de manière simple et élégante. Ce procédé assure la finesse de la représentation.
Les timbres-poste monochromes sont souvent centrés autour de portraits de personnalités historiques.
D’autres comportent des symboles nationaux, tels que des armoiries, des drapeaux ou des monuments célèbres. Ces éléments sont souvent intégrés dans des motifs ornementaux qui enrichissent le design de l’illustration sans l'encombrer.
Les scènes historiques et les paysages sont également des thèmes populaires sur les timbres-poste monochromes. Ils montrent souvent des paysages nationaux emblématiques. Le tout est exécuté avec une grande rigueur dans les lignes et les détails.
Le timbre-poste suivant montre l'abbaye de Melk, un monument historique majeur situé au bord du Danube, dans la ville autrichienne de Melk. Il a été émis le 7 mai 1963 par la République d’Autriche.
L'abbaye de Melk est à la fois un lieu de culte, un centre d'érudition et un symbole important du patrimoine religieux de l’Autriche. L’histoire de ce monastère remonte au XIe siècle et son développement en a fait l'un des monuments les plus visités du pays.
Après l'occupation nazie, l'Autriche d'après-guerre devait reconstruire sa réputation internationale. L'émission de timbres-poste commémoratifs était une manière pour l'État de projeter une image positive et de rétablissement.
La valeur faciale de ce timbre-poste autrichien est de 20 schillings. Le schilling autrichien (Österreichischer Schilling) a été introduit en 1925 en remplacement de la couronne austro-hongroise.
Durant l’annexion de l’Autriche à l’Allemagne nazie, le schilling autrichien fut remplacé par la monnaie du Troisième Reich à un taux de 1 Reichsmark pour 1,5 schilling. Le schilling a été rétabli comme monnaie officielle de l’Autriche après la guerre. Il fut remplacé par l’euro le 1er janvier 2002.
L'abréviation utilisée pour désigner le schilling autrichien était « ATS » :
- A pour Austria ;
- T pour taler (le taler, était une ancienne unité monétaire européenne) ;
- S pour schilling.
Cependant, celle pour le désigner sur les timbres-poste était « S ».
Adalbert Pilch : un maître de la gravure philatélique
Le design du timbre-poste de l’abbaye de Melk a été conçu par Adalbert Pilch, un artiste autrichien connu pour ses créations philatéliques. Cet artiste a conçu un grand nombre de timbres commémoratifs durant les années 1950 et 1960.
Pilch était apprécié pour sa capacité à combiner des éléments traditionnels et modernes dans ses créations. Son style graphique est précis, tout en demeurant élégant et accessible.
La représentation de l'abbaye, perchée sur une colline rocheuse, est finement détaillée, avec des lignes nettes et précises ; elles soulignent parfaitement l'architecture baroque imposante du bâtiment. Les tours jumelles, caractéristiques de l'abbaye, sont magnifiquement gravées et l'ensemble de la composition dégage une sensation de majesté.
La gravure sur métal : l'abbaye de Melk vue par Rudolf Toth
La gravure de l’abbaye de Melk a été réalisée par Rudolf Toth, un graveur autrichien connu pour son travail sur les timbres-poste. Il est reconnu pour son habileté à réaliser des gravures sur métal délicates et détaillées, apportant une précision technique à l'art philatélique.
La gravure de Toth est remarquable pour la précision avec laquelle il a reproduit l'architecture complexe de l'abbaye de Melk. Il a su rendre l'essence du monument tout en jouant avec les ombres et les lignes afin de créer une représentation fidèle et expressive de l'abbaye.
Le timbre-poste de l’abbaye de Melk comporte une magnifique teinte rose, dont les nuances mettent en valeur les détails de la gravure du bâtiment.
En présentant une illustration graphique élégante et symbolique, ainsi qu’une gravure minutieuse et attentive aux détails, ce timbre-poste a permis de souligner l'importance historique et culturelle de l'abbaye de Melk pour la République autrichienne.
Il incarne une vision positive et renaissante du pays, basée sur ses traditions et son patrimoine.
Les couleurs et la manipulation de l'encre dans l'impression des timbres-poste monochromes
La désignation des couleurs des timbres-poste monochromes résulte d'un choix minutieux, dans lequel l'esthétisme côtoie des considérations techniques et symboliques.
Les artistes choisissent les couleurs en fonction de la nécessité de créer un contraste fort tout en tenant compte de la disponibilité des encres et de l'harmonie générale de la composition.
La couleur joue également un rôle dans l’émotion qu’elle suscite chez le spectateur. Elle reflète les sensibilités et les valeurs qui transcendent les cultures et les époques.
- le noir a été l'une des premières couleurs utilisées en raison de sa capacité à offrir un contraste fort et une grande lisibilité ;
- le marron ou le gris ont été beaucoup utilisés dans les premières émissions de timbres-poste, car ces couleurs étaient faciles à produire et relativement économiques ;
- le bleu est une couleur populaire, en raison de sa luminosité et de son attrait visuel ;
- le rouge évoque souvent des sujets royaux ou des thèmes liés au pouvoir ;
- le vert, couleur de l'espoir et du renouveau, est souvent utilisé pour célébrer des événements positifs ou des anniversaires.
Les étapes de la fabrication d’une couleur d’encre
La sélection des pigments de la couleur désirée
Les pigments utilisés pour fabriquer les encres sont aussi variés que les couleurs qu'ils produisent. Issus du règne minéral, végétal ou synthétique, ils offrent une palette infinie de nuances et de propriétés. Leur sélection est importante pour garantir la visibilité et la durabilité des encres produites.
La préparation des pigments
Les pigments sont broyés en une poudre fine afin de faciliter leur mélange avec un liant et de maximiser leur surface de contact. La qualité de ce broyage est essentielle pour garantir que la couleur soit uniforme et saturée sur le papier. Le broyage des pigments assure également une meilleure dispersion de la couleur dans la pâte d'encre.
Le mélange des pigments avec un liant
Les pigments sont ensuite mélangés avec un liant. Les liants sont des substances qui permettent à l'encre de s'appliquer de manière uniforme sur le papier et de maintenir les pigments ensemble. Le liant sert également à fixer le pigment sur le support, afin de garantir que la couleur demeure stable et ne s'estompe pas avec le temps.
L’ajout d'un solvant
Des solvants comme l'alcool ou des produits dérivés du pétrole sont ajoutés pour ajuster la viscosité de l'encre. Ces solvants permettent de rendre l'encre suffisamment fluide pour qu'elle puisse être appliquée facilement lors de l'impression, tout en permettant un séchage rapide après l'application sur le papier.
La viscosité de l'encre est particulièrement importante : elle doit être suffisamment fluide pour être transférée correctement sur le papier et suffisamment épaisse pour éviter les fuites ou les bavures. La netteté et la beauté de l’image d’un timbre-poste monochrome dépendent de cette adéquation.
Pendant les années 1920 à 1960, les timbres-poste étaient principalement imprimés avec des encres à base d'huile ; cette composition offrait des avantages pratiques pour la durabilité des encres et la production des timbres-poste en série.
Bien que les encres à base d'eau aient commencé à émerger dans les années 1950 et 1960, elles étaient encore relativement rares pour l'impression des timbres-poste monochromes à cette époque. Les encres à base d’eau se sont généralisées à partir des années 1970 avec les préoccupations croissantes concernant l'impact environnemental des solvants et des huiles utilisés dans leur fabrication.
L’application de l'encre sur les timbres-poste monochromes
Une fois l'encre préparée, elle peut être utilisée dans les presses d'impression. Deux méthodes principales sont utilisées pour l’impression des timbres-poste monochromes :
La gravure
Dans le procédé de gravure, l'encre est appliquée sur une plaque gravée, puis transférée sur le papier sous pression. Ce procédé permet d’obtenir des détails très fins garantissant des contrastes élevés et une visibilité maximale des éléments gravés.
La technique de la gravure est souvent utilisée pour les timbres-poste de haute qualité, où la précision des détails est primordiale.
L’offset
L'impression offset est un procédé plus moderne, dans lequel l'encre est d'abord appliquée sur une plaque, transférée sur un rouleau et ensuite sur le papier.
Cette méthode convient pour les tirages philatéliques importants ; elle permet de produire des grandes quantités de timbres-poste, tout en maintenant une bonne qualité d'impression.
Le contrôle de l'intensité de l'encre est une étape délicate lors de l'impression des timbres-poste ; une trop grande quantité d'encre peut entraîner des bavures et des contours flous, tandis qu’une quantité insuffisante peut rendre l’image pâle ou illisible.
Les imprimeurs doivent ainsi ajuster les plaques des gravures taille-douce ou les rouleaux offset pour garantir un transfert uniforme de l'encre, ce qui est particulièrement important dans l’impression des timbres-poste monochromes : l'uniformité de la couleur doit être maintenue tout au long de la série philatélique imprimée.
Le séchage et la fixation de l'encre sur les timbres-poste
Une fois l’encre appliquée sur les timbres-poste, elle doit sécher correctement afin d’éviter les bavures ou les transferts d'encre sur d’autres surfaces. Le séchage de l'encre peut être réalisé de différentes manières :
Le séchage par la chaleur
Les encres à base d'huile ou à base de résines sont séchées en exposant le papier à de la chaleur dans des séchoirs à air chaud ou dans des fours à température contrôlée. Ce processus permet d'accélérer l'évaporation des solvants et la fixation de l'encre. Il rend les timbres-poste rapidement manipulables sans risque de bavures.
Les avantages de ce procédé incluent un temps de séchage réduit. Toutefois, cette méthode nécessite des équipements spécialisés, tels que des fours ou des séchoirs, et peut présenter des risques de déformation du papier si la chaleur est mal contrôlée.
Le séchage à l'air
Le séchage à l'air est une méthode qui convient pour les encres à base d’eau, dans laquelle l’eau s'évapore naturellement. Cette méthode est simple, économique et ne nécessite pas d'équipement particulier. Cependant, le séchage de l’encre à l’air est relativement long et présente une sensibilité aux variations d'humidité et de température.
Le séchage par la chaleur était la méthode prédominante pour le séchage de l’encre des timbres-poste monochromes durant les années 1920 à 1960.
À partir des années 1970, le séchage à l'air est devenu de plus en plus courant, en particulier pour les timbres-poste imprimés avec des encres à base d'eau. Cependant, le séchage par la chaleur demeure encore utilisé pour certaines productions philatéliques nécessitant un séchage rapide.
Le contrôle de la qualité
Les imprimeurs doivent s'assurer que les timbres-poste sont imprimés de manière cohérente, propre et sans défauts. Des inspections régulières sont menées pendant tout le processus de production, afin de vérifier l’uniformité de l'encre, la netteté des détails et la durabilité de l'impression.
La bonne gestion de l’application des encres est ainsi essentielle pour garantir que les timbres-poste répondent aux normes de qualité, d’esthétisme et de longévité. C’est grâce aux soins dans la manipulation des encres que les timbres-poste monochromes conservent leur éclat et leur beauté au fil des années.
Le monochrome au service de la communication sur les timbres-poste
Parmi les couleurs les plus marquantes sur les timbres-poste monochromes, le bleu Prusse, le vert olive, le rouge pourpre et le violet se distinguent par leur grande beauté et leur histoire. Ces couleurs, souvent utilisées sur des timbres-poste de plus haute valeur ou pour des émissions spéciales, sont souvent recherchées par les collectionneurs.
Le bleu Prusse : une couleur emblématique de la philatélie
L'encre bleu Prusse, un bleu intense et profond, se caractérise par une teinte allant du bleu foncé au bleu-vert. Cette couleur a été particulièrement appréciée pour l’impression des timbres-poste monochromes, en raison de sa forte visibilité et de sa durabilité.
L’encre bleu Prusse est réalisée à partir de pigments créés à base de sels de fer et de cyanure. Ce pigment a été découvert au début du XVIIIe siècle par le chimiste allemand Johann Jacob Diesbach.
Le bleu Prusse a rapidement gagné en popularité en raison de sa richesse et de sa stabilité, devenant l'un des premiers pigments modernes à être largement utilisé dans les encres d’impression. La couleur elle-même peut être ajustée en fonction de la proportion des composés, créant ainsi différentes variations de ce bleu particulier.
Les premiers timbres-poste imprimés avec cette couleur ont été émis par le Royaume de Prusse en 1850. Ils étaient utilisés pour affranchir le courrier à destination ou en provenance des États allemands.
L’introduction des timbres-poste présentant la couleur bleu Prusse a marqué une étape importante dans le développement du système postal en Allemagne.
Les pigments utilisés pour réaliser l’encre bleu Prusse était à cette époque relativement coûteux, ce qui a contribué à l'attrait des timbres-poste monochromes imprimés dans cette couleur dans le monde philatélique.
Le timbre-poste suivant est un magnifique exemple d’un timbre monochrome imprimé avec de l’encre bleu Prusse. Il a été émis en 1941 par la Norvège et s’intitule Avant la bataille de Stiklestad. Il fait partie d’une série philatélique commémorant l’écrivain islandais Snorri Sturluson.
Le contexte de l’émission de cette série philatélique est traité dans une chronique sur l’histoire de la Norvège intitulée Le nationalisme norvégien sur les timbres-poste : Snorri Sturluson (1/2) .
La gravure de ce timbre-poste monochrome est une reproduction fidèle d’un dessin intitulé Sur chaque chemin il y avait des gens, créé par un artiste norvégien du XIXe siècle. La gravure a été réalisée avec une précision minutieuse, comme en témoigne la représentation des guerriers en marche et du paysage environnant.
L’utilisation de lignes fines et de hachures permet de donner de la profondeur et de la texture à la scène. Ce type de gravure est typique des timbres de grande qualité, où chaque détail est soigneusement travaillé pour produire une image qui demeure nette et précise, même à petite échelle.
La texture des vêtements, des armures et des personnages, ainsi que les éléments naturels comme les nuages et le sol sont rendus avec un niveau de détail très élevé.
Ce timbre-poste monochrome constitue une pièce philatélique très appréciée pour sa grande beauté : la qualité de la gravure, la richesse des détails et la beauté de l'encre bleu Prusse lui confèrent une valeur esthétique indéniable.
Le vert olive : une teinte naturelle pour des timbres-poste raffinés
Le pigment principal utilisé pour créer le vert olive est le vert de Chrome, un pigment durable et particulièrement populaire pour la fabrication des encres d'imprimerie. Il peut être mélangé avec des pigments de couleurs plus terreuses afin de produire la couleur spécifique du vert olive. Dans certains cas, des pigments à base de cobalt, de phthalocyanine ou vert de cobalt sont utilisés pour enrichir la couleur.
Pour donner à l'encre une teinte plus chaude et terreuse, des pigments jaunes ou des pigments bruns comme la terre de Sienne brûlée peuvent être ajoutés.
Le timbre-poste suivant n'est pas monochrome, mais il présente une magnifique teinte vert olive qui mérite une attention. Il a été émis par la République française le 2 décembre 1978 et s’intitule Le Rat de ville et le Rat des champs.
Il rend hommage à une fable de Jean de La Fontaine tirée de son recueil publié en 1668.
Dans cette fable, La Fontaine nous délivre une morale sur les différences entre la vie de luxe et la vie simple, suggérant que la tranquillité et la sécurité valent mieux que les dangers de la richesse. Cette fable est souvent interprétée comme une réflexion sur les valeurs de l'humilité et de la simplicité, en contraste avec les risques et les faiblesses de la recherche excessive du confort matériel.
La valeur faciale de ce timbre-poste est de 1,50 francs. Un supplément de 0,30 franc était réservé au bénéfice des actions de la Croix-Rouge, ajouté à la valeur d’affranchissement de 1,20 franc.
La gravure de ce timbre-poste est d'une grande finesse, en particulier dans le traitement des détails des personnages, des vêtements, des éléments naturels et des objets. Voici quelques points qui montrent cette finesse :
Les traits des rats sont rendus avec précision, en particulier leurs expressions faciales. On perçoit bien la distinction entre les deux rats : l’un est riche et sophistiqué et l'autre plus simple et décontracté.
Les assiettes et les bouteilles sont minutieusement gravés et chaque texture est rendue de façon réaliste.
Le paysage en arrière-plan est également traité avec une grande précision. Dans la partie présentant le rat des champs, les arbres, les champs et les montagnes sont réalisés avec des lignes nettes et une attention particulière portée aux moindres détails.
Les nuances de l'encre vert olive ajoutent une touche de profondeur aux deux scènes ; les zones ombragées sous les objets ou les plis des vêtements sont rendues avec une subtilité qui témoigne d’un grand soin dans la gravure.
La gravure transmet avec finesse l’essence de chaque environnement : la couleur vert olive évoque la campagne et l'environnement rural du rat des champs, tout en étant suffisamment riche pour donner de la profondeur et du contraste aux éléments du rat de ville.
Le rouge pourpre : la couleur du pouvoir
La création de l’encre rouge pourpre repose sur un processus complexe permettant d'obtenir une teinte vibrante et unique. Plusieurs types de pigments sont utilisés pour obtenir cette teinte riche et profonde :
- des pigments rouges : le pigment principal utilisé dans la fabrication de l'encre rouge pourpre est un pigment rouge vif, souvent à base de carmin ou de rouge de cadmium. Ces pigments sont responsables de la teinte de base rouge ;
- des pigments violets : pour obtenir la nuance pourpre, des pigments violets comme le violet de manganèse ou le violet de cobalt sont utilisés. Ces pigments aident à donner à l'encre la profondeur et la subtilité qui caractérisent le rouge pourpre ;
- des pigments bleus : parfois, une petite quantité de pigment bleu, tel que le bleu Prusse ou le bleu phtalocyanine, est ajoutée pour équilibrer la teinte et donner un aspect plus profond et plus sombre à la couleur ;
- des pigments jaunes : de petites quantités de jaune peuvent aussi être ajoutées pour moduler la couleur, lui donnant plus de chaleur et d'intensité, en fonction du ton désiré.
Le timbre-poste suivant a été émis le 14 avril 1944 par le Troisième Reich, à l'occasion du 55e anniversaire d'Adolf Hitler. La valeur faciale (54 + 96) présente une surtaxe liée à la célébration nationale de son anniversaire.
Le visage du personnage est gravé avec une grande attention aux détails, reproduisant les traits spécifiques d’Adolphe Hitler : la moustache, les yeux et le chapeau. Le portrait est formel et dégage une sensation de rigidité et de discipline, caractéristiques d'une figure destinée à inspirer la crainte et le respect.
La couronne de laurier entourant le portrait est gravée avec une grande minutie, chaque feuille étant clairement définie. La disposition des croix gammée et des aigles impériaux reflètent le style iconographique du Troisième Reich. Ces éléments ont été soigneusement travaillés pour être instantanément reconnaissables.
Le rouge pourpre accentue l'intensité de l’illustration tout en apportant un confort visuel. Il permet aux détails du portrait et des symboles de ressortir clairement. Cette disposition des éléments foncés crée un contraste frappant avec l’arrière-plan plus clair de l’illustration.
Le terme « pourpre » trouve ses origines dans le grec ancien πορφύρα (porphýra), qui désignait un coquillage dont on extrayait le colorant pourpre dans l’Antiquité. Cette teinture était extrêmement coûteuse à produire, ce qui faisait de cette couleur un symbole de richesse, de pouvoir et de statut social élevé.
Les timbres-poste monochromes présentant le rouge pourpre sont ainsi souvent associés à des notions de royauté, de pouvoir et de répression. Cette couleur est symboliquement adaptée pour un timbre commémoratif en l'honneur d'Hitler et du Troisième Reich.
Le violet : une couleur noble pour des timbres raffinés
Les timbres-poste violets occupent une place particulière dans le monde de la philatélie, en raison de leur richesse esthétique. Comme la couleur rouge pourpre, le violet a longtemps été perçu comme une couleur rare et coûteuse. Elle était aussi associée à la royauté et à l’aristocratie ; elle symbolise également la spiritualité. Avec l’avènement des pigments synthétiques au XIXe siècle, la production de cette couleur est devenue beaucoup plus accessible.
Le pigment violet est généralement obtenu en mélangeant des pigments rouge et bleu. La teinte exacte du violet dépend des pigments choisis. :
- le violet de manganèse : c'est l’un des pigments violets les plus utilisés dans les encres pour timbres-poste. Il produit une couleur violet pâle à violet moyen, légèrement bleuâtre ;
- le violet de cobalt : ce pigment produit une couleur stable, qui crée un violet clair et saturé. Il est souvent utilisé pour obtenir un violet vif et pur ;
- le violet d’alizarine : ce pigment est dérivé de l’alizarine, une matière organique qui produit des nuances plus profondes et plus riches de violet.
Des mélanges de bleu phthalocyanine, de rouge de cadmium ou de rouge de quinacridone permettent de produire des nuances variées de violet, allant de tonalités plus froides à d’autres plus chaudes.
Le timbre-poste suivant a été émis le 13 octobre 1986 par la République française. Il présente l’avion Wibault 283, un trimoteur léger conçu au début des années 1930 par l'ingénieur français Jean Wibault. Cet avion était destiné au transport de passagers et avait pour but de concurrencer d'autres modèles d'avions légers de son époque.
La mise en service de l’avion Wibault 283 a marqué une étape importante dans le développement des lignes aériennes françaises.
Ce timbre-poste a été utilisé pour affranchir le courrier envoyé par le service postal aérien. Il présente une valeur faciale de 30 francs, indiquant qu’il a été conçu pour couvrir des coûts additionnels associés à l'envoi postal par avion.
La gravure de ce timbre-poste montre une représentation très détaillée de l’avion et de ses composantes :
La structure de l’avion est minutieusement gravée, y compris les détails du fuselage, des moteurs, et des ailes. Les hublots, les marques d'identification, et même les petites lignes de rivets sur l’appareil sont soigneusement représentés.
L'effet de mouvement des hélices est obtenu par des lignes très fines et nettes qui créent une sensation de vitesse. Ce genre de détail dans la gravure témoigne du soin apporté à l'illustration.
Le ciel en arrière-plan présente un dégradé subtil qui est une caractéristique des gravures classiques. Ce fond est simple mais efficace, ne détourne pas l'attention sur l'avion tout en créant une atmosphère aérienne.
Ce timbre-poste est une parfaite illustration de la façon dont le violet peut sublimer une image. Cette couleur confère à la représentation une certaine noblesse et une atmosphère quasi onirique.
Les timbres-poste monochromes modernes
Le monde philatélique actuel assiste à un retour aux timbres-poste monochromes. L'élégance des couleurs sobres et classiques redonne une nouvelle dimension aux collections de timbres modernes.
Cette approche permet de renouer avec la simplicité et la sobriété des timbres-poste anciens, souvent considérés comme des objets d'art. La simplicité graphique et le caractère épuré des nouveaux timbres-poste monochromes séduisent les collectionneurs appréciant leur aspect minimaliste.
Cette tendance peut refléter un désir de se démarquer dans un monde où la surabondance d'images et de couleurs submerge parfois les individus. Comme décrit plus haut, les timbres-poste monochromes se distinguent par leur sobriété, ce qui les rend visuellement marquants ; ils sont également plus économiques à produire, ce qui donne un clin d’œil à une démarche plus responsable et respectueuse de l'environnement.
Les nouveaux timbres-poste monochromes peuvent également servir de moyen pour célébrer les grandes traditions philatéliques tout en s'inscrivant dans un contexte contemporain : en évoquant des événements ou des figures historiques de manière simple et significative, l’histoire de la philatélie se connecte avec les attentes modernes des collectionneurs et du grand public.
Le feuillet philatélique suivant a été émis par la République française le pour le 400e anniversaire de la naissance de Jean-Baptiste « Molière » Poquelin. Il présente un ensemble harmonieux d'éléments visuels en hommage au célèbre dramaturge français du XVIIe siècle.
Le feuillet montre quatre personnages célèbres figurant dans des pièces de Molière : Magdelon (Les Précieuses ridicules, 1659), Sganarelle (Sganarelle ou le Cocu imaginaire, 1660 et d’autres pièces), M. Fourdain (Le Bourgeois gentilhomme, 1670) et Agnès (L'École des femmes. 1662). Chaque personnage est représenté dans son costume d'époque, montrant l'essence des rôles interprétés dans les comédies de Molière.
Le feuillet philatélique contient quatre timbres-poste monochromes présentant Molière sous forme de portrait avec ses dates de naissance et de décès (1622-1673). La valeur faciale de chaque timbre est de 1,16 €.
L'image montre Molière avec ses cheveux bouclés et une expression légèrement souriante. Il est représenté dans un style classique, avec un regard direct et une pose élégante.
Le monochrome rouge se décline en un dégradé raffiné qui met en valeur le portrait de Molière. Cette conception graphique offre une belle harmonie entre l'image et les éléments textuels sur le timbre-poste.
La conception simplifiée des nouveaux timbres-poste monochromes permet ainsi de revenir à l'essentiel, tout en offrant une esthétique raffinée et accessible.
Le monochrome, un héritage intemporel
Les timbres-poste monochromes, à travers leur simplicité et leur richesse historique, continuent de captiver les collectionneurs et les amateurs d'art philatélique.
L’évolution de leur production et l’utilisation de couleurs uniques permettent de célébrer des moments significatifs du passé et d’offrir un regard original sur l’art de l’impression en philatélie.
Le retour aux timbres-poste monochromes dans le monde philatélique moderne n'est peut-être pas une simple tendance ; il peut apparaître comme une manière de rendre hommage à une époque durant laquelle l’art de l’impression des timbres-poste se mesurait à la finesse des détails et à la pureté des lignes.
R. Simard
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